À l’heure où la loi Duflot est mise entre parenthèses et où l’on tente de raboter comme on peut les dépenses publiques, la Fondation Abbé Pierre fait le point sur la question du mal-logement.
La Fondation Abbé Pierre rappelle que de nombreuses choses ont été faites depuis l’hiver 54 et le célèbre appel de l’Abbé Pierre. Mais c’est un mal qui reste un fléau : on compte encore 3,5 millions de personnes mal-logées ou non-logées. Le nombre de SDF a explosé entre 2001 et 2014, de plus de 50 %. On déplore plus de 500 morts de rue chaque année. Les bidonvilles ont fait leur réapparition, de plus en plus de gens évoluent vers des campings pour se loger. Les pauvres dépensent en moyenne 39 % de leurs ressources dans le logement. Les jeunes et les familles monoparentales sont de plus en plus touchés. Pour la Fondation Abbé Pierre, à l’inverse du fatalisme, il faut au contraire, plus que jamais, agir, sachant que l’on estime maintenant que dix millions de personnes sont aujourd’hui touchés à des degrés divers par la crise du logement.
Des solutions difficiles à mettre en œuvre
Il faut envisager des solutions. Pour la Fondation Abbé Pierre, il faudrait disposer aujourd’hui de 800 000 logements. Le problème est complexe, car ce n’est pas seulement le nombre de logements qui est en cause, mais aussi son prix. De plus, la demande en termes de logements n’est pas homogène sur tout le territoire français, mais il existe des zones de demandes beaucoup plus fortes que d’autres, en raison notamment de la concentration de l’emploi, qui fait exploser la rareté et donc les prix du logement.
Que faire ? Le volontarisme politique ne peut pas tout. On rencontre des freins importants. Par exemple le « 115 », dispositif légal qui oblige le préfet à trouver un hébergement pour toute personne en détresse, existe bien sur le papier mais il n’y a matériellement pas autant de places en hébergement que de demandes adressées au préfet (61 % de demandes inabouties pour l’hiver 2013/2014). Il y a également des obstacles économiques : le loi Alur a été mise entre parenthèses pour ne pas effrayer les acteurs de l’immobilier, et les fonds alloués aux fonctionnaires chargés d’aides sociales se sont vus aussi réduits.
Les propositions de la Fondation Abbé Pierre
Une chose est sure pour la Fondation Abbé Pierre : il ne s’agit pas de « laisser faire », il faut réguler. D’abord en adaptant la construction à la demande, en nombre de logements, mais aussi en terme de prix de logements. A coté de cela, il faut revoir le fonctionnement de l’hébergement d’urgence : en finir avec la gestion au thermomètre, et se donner pour objectif un logement pérenne pour tous ceux qui appellent le « 115 ». Il faut encore revoir la législation et la mettre en cohérence avec les besoins : par exemple revoir les normes d’habitation qui fait que certains logements vacants restent vide.
Pour tout cela il faut une vraie volonté politique de combattre la crise du logement, qui doit conduire les responsables politiques, de concert avec les associations, à s’attaquer vraiment au problème. Non seulement le gouvernement, ou les députés doivent s’investir, mais aussi les maires et les collectivités intercommunales. Pour cela, conclut l’ouvrage, il faut reconnaître des priorités budgétaires. Certes, il n’y pas beaucoup d’argent dans les caisses de l’État, mais la solidarité envers les plus démunis passe avant tout.
Crise du logement, bien la comprendre pour mieux la combattre
Christophe Robert, Anne-Claire Vaucher et Manuel Domergue
Editions Le Cavalier Bleu, 2014
182 pages, 20 euros