Jusqu’en 2008, il était rarement question, dans l’actualité, des agences de notation. Qui n’a pas depuis entendu parler presque chaque jour de Standard & Poor’s, de Moody’s, et de Fitch ? Les notes que ces agences attribuent, sous la forme de séries de lettres, sont désormais célèbres, notamment la plus élevée, le « triple A ».
Il s’agit plus précisément des agences de notation financière. Ces organismes privés, apparus aux USA à partir de 1860, établissent des diagnostics de l’état financier des acteurs de la vie économique, des organismes et institutions publics, ainsi que de produits financiers précis. Il en existe plus de 150 dans le monde, mais les trois les plus importants, cités plus haut, concentrent près de 90 % du secteur en jeu.
Les agences de notation ont acquis depuis le début de la crise mondiale de 2008 une grande notoriété par les notes qu’elles décernent aux Etats. Ces notes ont un effet direct sur les possibilités d’emprunt des Etats, car elles sont devenues les principaux critères sur lesquels s’appuient les marchés financiers pour décider d’accorder ou pas un prêt, et à quel taux d’intérêt.
Autrement dit, les investisseurs (ceux qui prêtent l’argent) se fient à ces indicateurs pour se faire une idée de la solvabilité, c’est-à-dire de la capacité à rembourser, de tel ou tel émetteur de dettes (celui qui emprunte).
Deux changements importants sont survenus pendant les années 1970. Les activités de notation ont été d’une part largement étendues aux Etats et aux organismes publics. D’autre part, l’organisme payeur n’était plus celui qui prêtait, mais désormais celui qui s’endettait. Le principe de l’émetteur-payeur a remplacé la règle de l’investisseur-payeur (voir schéma).
Cela a contribué à instaurer une proximité entre les agences et les emprunteurs, avec le risque de conflits d’intérêt et de notes mal évaluées. Les agences de notation auraient mené un chantage auprès des emprunteurs publics pour qu’ils coopèrent de près et ne se laissent plus imposer des notes demandées par les investisseurs.
Depuis les années 2000, l’essor et la mondialisation des marchés financiers, puis le surendettement des Etats européens, ont donné une place toujours plus centrale aux agences de notation, dans la vie économique, mais aussi politique. Il est désormais question presque chaque jour de menaces de baisse de la note de tel ou tel pays. Plusieurs Etats de la zone Euro ont vu la leur dégradée à plusieurs reprises à partir d’octobre 2010. Par exemple, celle de la Grèce est passée alors, selon l’échelle de notation de Standard & Poor’s, à BB+, puis B (en mai 2011), CCC (juillet 2011), et CC (depuis août 2011). En d’autres termes, la Grèce ne peut plus emprunter sur les marchés financiers.
Cela amène à se demander dans quelle mesure les agences de notation, organismes principalement américains, agissent avec des objectifs politiques et dans le contexte d’un rapport de force entre les USA et l’Europe.