Alain Maigre est photographe de métier. Actuellement bénéficiaire de la prime d’activité, il cherche les moyens pour continuer à vivre de son art. Focus sur le parcours d’un passionné qui a vécu les mutations de la profession.
A 54 ans, Alain Maigre garde intacte la passion de l’image : traduire en photo un certain regard, surprendre en montrant la facette cachée d’un sujet apparemment banal, telles sont les motivations de cet artisan qui s’est construit sa vocation tout au long de sa vie.
La photographie : une démarche structurée
Enfant, Alain Maigre est déjà fasciné par l’image, que ce soient les photos prises pas son père ou les vues en super 8 de son oncle. A 12 ans, il réalise ses premiers clichés avec un Pocket Instamatic, l’équivalent du compact pour l’époque.
Une époque où « la photographie était une véritable démarche » pour le photographe qui déplore l’évolution des pratiques avec l’ère du numérique et la possibilité de mitrailler avec son téléphone à tout bout de champ. « D’abord il y avait l’appareil puis la prise de vue avec une pellicule qu’on allait faire développer chez le photographe de quartier, enfin les clichés papier : il y avait quelque chose de soigné et de construit. Les amateurs, ils avaient déjà un œil ».
Avoir l’œil : une qualité essentielle pour un photographe comme la maîtrise de son matériel. A 18 ans, Alain Maigre ne rate pas un concert de la scène rock valentinoise, sa ville natale. C’est à ce moment-là qu’il commence à structurer sa pratique : « Shooter une expression, un instant… Et trouver la bonne pellicule que je pourrais pousser dans les bains de développement ». Un vrai travail de chimiste pour déterminer les temps de passage dans les bacs.
©Alain Maigre
L’apprentissage au fil du temps
Si l’apprentissage de la photo ne lui fait pas peur, l’école, par contre, l’intéresse peu et il se retrouve orienté en lycée professionnel où il apprend la micro-mécanique. CAP et BEP en poche, il trouve un emploi dans une entreprise qui fabrique des machines de tri postal. Même s’il évolue rapidement dans la société – d’ouvrier à technicien – c’est la photographie qui continue à l’animer. C’est alors qu’il franchit les portes du club photo de la MJC locale et se retrouve entouré de passionnés avec qui partager et découvrir : « On faisait le travail de A à Z. On se conseillait sur la prise de vue, on développait dans la semaine, on regardait les planches contact puis on faisait les tirages de lecture : c’était une belle école ».
Fort de cette expérience, il demande un congé Fongecif afin de devenir professionnel de la photo. Sa demande acceptée, il rentre alors en formation et obtient le diplôme après deux ans d’études à Lyon. De retour à l’usine, il négocie un licenciement transactionnel et commence ses recherches pour travailler de sa passion. Il enchaîne les stages puis réussit à intégrer un studio de prise de vue. Les entreprises qui font appel à sa structure sont très diverses : « on photographiait de tout : des écrous aux chaises de jardin, du chocolat au produits de maquillage… »
Alain Maigre va travailler douze ans dans l’entreprise. Mais en 2005, c’est le licenciement économique. L’arrivée du numérique transforme les pratiques et les conceptions autour de la photo : « La photographie n’est plus considérée comme un métier ». Seul aux commandes, Alain Maigre prend alors le statut d’auteur-photographe. Pendant dix ans, il « tourne » bien grâce à un client régulier. Mais quand celui-ci fait faillite, l’activité de son prestataire bat de l’aile, à tel point qu’il doit déposer le bilan à son tour.
Coque en deux temps ©Alain Maigre
Trouver le bon statut
Il se met alors à chercher le statut qui lui permettra de continuer à vivre de son métier. Il teste son activité en CAE (Coopérative d’Activité et d’Emploi) avec un statut d’entrepreneur salarié. Mais l’activité n’est pas suffisamment viable pour qu’il puisse intégrer la Scop. Il enchaîne alors trois années de galère aux minimas sociaux.
Aujourd’hui, il travaille chez Act’rmc, une société de portage salarial. Pour lui, c’est une solution alternative qui permet d’être salarié (Il est employé par Act’RMC qui facture les prestations aux clients qu’il démarche), de bénéficier de la prime d’activité et de ne pas avoir à effectuer la gestion administrative de son activité. Car travailler en indépendant, c’est devoir assumer la gestion administrative et le démarchage commercial : des tâches connexes qui ne s’improvisent pas et qui sont essentielles pour pérenniser son activité.
Aujourd’hui, Alain Maigre espère trouver et fidéliser de nouveaux clients. Dans sa botte, il a mûri au fil du temps son goût pour la photo gastronomique : échanger avec des chefs étoilés autour d’une assiette dressée à la perfection – retrouver le goût des bonnes choses bien faites – un leitmotiv permanent pour cet orfèvre visuel, à qui l’on souhaite d’atteindre ses objectifs.