Depuis 1967, Althea compte dans le paysage associatif grenoblois. Rencontre et présentation d’une structure résolument tournée vers l’écoute et l’accompagnement.
Un service appart’
L’âge de la sagesse ? Althea fêtera bientôt ses cinquante ans et à défaut de s’offrir une Rolex, l’association et celles et ceux qui lui ont permis d’exister depuis sa création pourront se targuer d’être venus en aide à nombre de femmes et d’hommes dans le besoin, et même dans l’urgence.
Althea est née au coeur de la grande mouvance sociale des années Dubedout, un an avant que Mai 68 n’amorce une prise de conscience salutaire en terme de politique familiale. « Dans le collectif, il y avait le planning familial, il y avait le Diaconat Protestant, il y avait le Secours Catholique… Toutes ces associations extrêmement dynamiques sur le territoire grenoblois, avec l’impulsion du maire, et naturellement la DDASS. » nous dit Sylvie Renoud-Grappin, directrice de l’association depuis 2010.
Un collectif issu d’un constat simple : le manque de structures pour venir en aide aux personnes en situation de prostitution. C’est ainsi qu’a été créé l’Appart’, l’une des branches d’Althea, qui a pour mission de venir en aide à ces personnes, en leur proposant un accueil et une écoute et, si elles le désirent, un accompagnement sur le long terme. L’année dernière, ce sont soixante-quinze personnes qui ont ainsi été suivies de manière intensive, en vue de les aider à se réinsérer socialement et professionnellement. Et plus de deux cent cinquante qui se sont tournées vers l’association, ne serait-ce que d’une manière ponctuelle.
Les professionnels de l’Appart vont également sur le terrain, à l’occasion de « maraudes » de jour comme de nuit, afin de rencontrer les prostituées sur leur terrain d’activité. Une prise de contact nécessaire qui permet en outre de dresser un état des lieux de la prostitution de rue sur Grenoble, même parcellaire. Ainsi, si l’on constate un grand nombre de personnes issues de l’immigration sub-saharienne parmi les prostituées, c’est aussi, nous précise la directrice, parce qu’il est beaucoup plus difficile d’établir le lien avec les « filles de l’Est ». Une chose demeure certaine : la prostitution touche en majorité les femmes, dont la plupart ont au moins un enfant.
À l’écoute et l’accompagnement s’ajoutent des temps de rencontres qui se déroulent dans les locaux d’Althea et se déroulent toujours en présence d’une « maîtresse de maison » qui assure à chacune de ces rencontres un climat chaleureux et, surtout, respectueux des personnes accueillies. Tables ouvertes ou petits-déjeuners sont l’occasion de créer du lien, de prendre du recul vis-à-vis de sa situation ou, simplement, d’avoir accès à un vrai repas.
Oasis, le grain de sable
Mais l’Appart n’est pas la seule activité d’Althea, qui gère également Oasis 38, dédié à l’hébergement des personnes en difficulté. Historiquement créée en lien avec l’Appart, la branche « logement » d’Althea en est aujourd’hui totalement indépendante. Basé sur le principe de l’accompagnement social avec hébergement, le CHRS Oasis 38 dispose d’un certain nombre de logements – soixante-quinze places en tout – où sont logées des personnes en grande précarité qui sont, en outre, suivies par un éducateur référent.
Contrairement au fonctionnement de l’Appart, les personnes prises en charge par Oasis 38 ne sont pas invitées à se présenter d’elles-mêmes. C’est en l’occurrence le POHI (Pôle Orientation Hébergement Insertion) qui les dirige vers la structure afin d’être hébergées et accompagnées, tant au niveau de la « simple » écoute que dans l’aide aux démarches administratives ou à la réinsertion sociale ou professionnelle.
Sylvie Renoud-Grappin insiste sur la philosophie d’Althea : « l’inconditionnalité de l’accueil » et le « non-abandon ». Une posture d’autant plus nécessaire lorsque l’association est amenée à accompagner des personnes en situation irrégulière, ou des profils socialement lourds. Si la plupart des occupants de logements le quitte au bout d’environ deux ans, une infime part des personnes suivies l’occupent depuis plus de dix ans, voire quinze ans.
La philosophie, c’est bien ce qui caractérise Althea, qui s’applique à travailler en réseau avec d’autres associations, telles que Relais Ozanam, Un toit pour tous ou l’Oiseau Bleu. « On est sur les mêmes lignes, et on travaille ensemble sur des projets, en refusant de faire dans le moins-disant ! » conclut avec conviction Sylvie Renoud-Grappin.