La mobilité est un des grand chantiers de la Métropole grenobloise. Entretien avec Yann Mongaburu, président du Syndicat Mixte des Transports en Commun.
Le Syndicat Mixte des Transports en Commun de l’agglomération grenobloise, c’est l’autorité organisatrice des mobilités depuis 2015 et la mise en place de la loi NOTRe (Nouvelle Organisation Territoriale de la République) : de la marche jusqu’à la voiture individuelle et du transport de personnes au transport marchandises, sur les 49 communes qui composent la métropole grenobloise. C’est une institution qui existe depuis plus de 40 ans, composée de deux collectivités, la métropole de Grenoble et le département de l’Isère, qui sont associés au sein du Syndicat Mixte pour planifier et organiser les mobilités dans leur ensemble et en particulier les services de transport en commun. Rencontre avec son président, Yann Mongaburu, le 26 Juillet 2018.
Qu’avez vous mis en place depuis votre arrivée pour favoriser l’accès à l’emploi ?
Yann Mongaburu : « Pour moi l’objectif est de proposer un niveau de service de mobilité qui est adapté aux différents territoires et à cette situation sociale spécifique. On a hérité d’investissements et de services très importants sur le centre urbain. On est un des seuls territoires en France à être aussi bien équipé, que ce soit en tramway ou en bus.
L’objet aujourd’hui, c’est de compléter le réseau du tramway, tout en continuant à l’améliorer, vis à vis de territoires qui ne bénéficient pas de tramway aujourd’hui, et pour lesquels il n’est pas forcément la réponse la plus adaptée, ou en tout cas celle qu’on peut mettre en œuvre rapidement.
La création des lignes Chronobus permet qu’il y ait aujourd’hui 75 % de la population métropolitaine qui soit à moins de 500 mètres d’une ligne magistrale, car les lignes Chrono ont la même amplitude horaire et la même fréquence que le tramway, donc la même garantie de liberté de circulation. Et ça permet de mailler le territoire de manière bien plus forte, dans la première couronne et surtout au-delà, dans les territoires plus périphériques.
Le deuxième enjeu est sur la justice sociale en terme de tarification. Première chose : pour la cinquième année consécutive, il n’y a pas d’augmentation de tarif pour ceux qui bénéficient d’une tarification solidaire. Nous avons voulu que les augmentations de prestations sociales ne soient pas absorbées par des augmentations d’abonnement. Nous sommes les seules en France à avoir fait ce choix là.
Autre élément, chaque année nous élargissons le public qui a droit à la tarification solidaire. Une fois par an nous augmentons le quotient familial qui rend éligible à la tarification solidaire, ce qui fait qu’aujourd’hui 28 % des abonnés bénéficient d’une tarification solidaire.
L’élément un peu plus nouveau, c’est l’accès aux droits sociaux : depuis Mai 2018, les abonnés n’ont plus a justifier de leur quotient familial. S’ils nous autorisent par le biais d’un formulaire, c’est désormais la collectivité qui prend les dispositions pour aller chercher le quotient familial de l’usager. Le quotient familial peut changer plusieurs fois dans l’année, ainsi nous pouvons appliquer le bon tarif en fonction de l’évolution de la situation de chacun. »
La tarification du service de métrovélo a également changé…
Y. M . : « Avant, il n’existait pas de tarification solidaire sur le vélo, et nous avons mis en place le même type de tarification solidaire que sur le réseau de transport en commun, en utilisant les mêmes logiques. Aujourd’hui, 15 % des abonnés de Métrovélo bénéficient d’une tarification solidaire. Ça reste le service de mobilité le moins coûteux, et au-delà de la son aspect environnemental et de qualité de vie, ça augmente aussi le pouvoir d’achat de ceux qui ont le moins. »
Quels sont vos pistes d’amélioration à court et moyen terme ?
Y. M. : « Pour le péri-urbain je pense à des voies réservés de bus sur les grandes voiries d’accès à la Métropole. Aujourd’hui nous en avons une sur l’entrée vers le Voironnais. Et ceux qui habitent dans le sud de la Métropole ont tout aussi droit à un service de bus qui soit qualitatif,et je me battrai jusqu’au bout pour qu’on ait une voie réservée aux transports en commun au sud du Rondeau.
Au delà des transports en commun traditionnels on a un vrai sujet sur le ferroviaire. Nous avons mis au cœur de notre stratégie la création d’un « RER » à la grenobloise car il n’y a rien de plus efficace, de plus rapide et de plus vertueux sur le plan environnemental, que le train pour relier les territoires. Notre objectif c’est d’avoir des investissements qui permettent d’avoir un service ponctuel, de qualité et un véritable cadencement. Pour nous, RER, ça veut dire avoir un train toutes les 20min de Rives à Brignoux et un train toutes les 30 min de Grenoble à Clelles, de façon à ce que chacun ait un mode d’accès à la Métropole proche de chez lui, sans recourir à la voiture individuelle.
Deuxième objet, c’est la marche et surtout le vélo, car on voit la croissance du vélo se faire très fortement sur le cœur de l’agglomération : 15 % des trajets domicile – travail se font à bicyclette, ce qui était inimaginable il y a dix ans.
L’enjeu, c’est que l’essor du vélo à assistance électrique permet, sur de la moyenne distance ou des territoires en pente, d’avoir la bicyclette qui peut venir compléter voir compenser la voiture individuelle. Là aussi ce n’était pas forcément imaginable il y a quelques années. L’assistance rend la bicyclette facile et plaisante dans des territoires ou elle n’avait pas forcément de sens auparavant.
Et enfin, la voiture partagée, pour deux raisons. Que chacun dans son village puisse accéder à une voiture quand il en a besoin sans avoir a en acheter. C’est l’enjeu de l’auto-partage.
D’autre part en moyenne les véhicules motorisés sont utilisés par 1,07 personne. Si on arrivait à ce qu’il y ait 10 ou 20 % des personnes qui utilisent la voiture qui fassent du co-voiturage, non seulement on n’aurait plus de bouchon, mais on ferait surtout faire un énorme gain de pouvoir d’achat aux usagers. Parce que de fait le coût du trajet est divisé par deux voir plus, selon le nombre de personnes. »
Comment faire pour que les publics précaires accèdent à ces différents dispositifs ?
Y. M . : « Il y a un dispositif dont on a hérité qui fonctionne bien et qu’on a renforcé, c’est la Plate-Forme Mobilité Emploi, qui permet d’accompagner les personnes en recherche d’emploi pour trouver quel est le mode de déplacement le plus adapté pour leur recherche d’emploi ou l’emploi auquel elles accèdent. On renforce ce dispositif car il est assez fort et il fonctionne bien. Il faut aller beaucoup plus loin que l’accès a l’emploi car on peut avoir d’autres motifs de déplacement.
Nous avons mis en place une agence de mobilité qui va sur tout le territoire dont la première mission est d’aller dans les quartiers les plus défavorisés, soit socialement, soit en terme de services de mobilité. »