Pour sa 9e édition, ce rendez-vous annuel de l’art contemporain régional nous propose une exposition collective aux médiums pluriels, signes de la diversité d’une production artistique oscillant entre réel et fiction.
Artistes in situ
Chaque année depuis 2007, cette manifestation gratuite organisée par le Magasin (Centre National d’Art Contemporain de Grenoble), rassemble en décembre une sélection d’artistes ayant un lien avec la région Rhône-Alpes. Elle se tient dans un site patrimonial : l’Ancien Musée de Peinture de Grenoble.
Le cru 2015 de l’exposition de Noël (PDF) intrigue et émeut par moments, détonne ou agace par d’autres. Si les commissaires se sont attachées à faire vivre une scénographie du lieu en rendant notamment visibles les dispositifs d’accrochage, nous avons été sensibles à l’irruption du réel dans cette galerie éphémère.
Retour vers le passé
Le vernissage de l’exposition a donné lieu à une performance d’Etienne Chosson : celui-ci a reproduit les dialogues émis lors de l’assemblée générale du F.H.A.R (Front Homosexuel d’Action Révolutionnaire) aux Beaux-Arts de Paris en 1971. L’artiste utilise le Re-enactment, littéralement reconstitution. Le film est diffusé sur écran et le performer réinterprète – en simultané – des témoignages qui touchent souvent à l’intime : on se trouve alors immergé à l’époque des premières luttes des minorités sexuelles. Et les revendications de ce film noir et blanc entrent en résonnance avec une actualité vacillante, entre dénonciation des intégrismes et replis identitaires.
Réel manipulé : le grand détournement
Si certaines créations questionnent, d’autres provoquent l’hilarité, à l’image de Désaccords de Jérôme Cavalière et Stéphane Déplan : des vidéos d’empoignades musclées entre artistes bourrés, entre artistes et spectateurs…
Un artiste frappe un spectateur pendant une… par surfergege
Ces vidéos sont des canulars, comme l’explique Rue89 dans « Les bastons de l’art contemporain ». Elles détournent néanmoins de vraies vidéos de bagarres, avec un objectif d’auto-dérision certes, mais en utilisant le levier de la violence gratuite, bien réel celui-ci.
Réel tangible ou mouvant…
Entre deux visionnages, s’intercalent des œuvres statiques : avec Manières de faire, Marion Wintrebert reproduit les gestes des mains dans les postures de communication : des gestes fugaces, immortalisés par une succession de moulages en latex. Ces mains racontent leurs propres récits dans un langage du corps que l’on redécouvre.
La proximité, on la ressent aussi à travers les réalisations de Mathilde Gintz, des photos d’un site de montagne dans la brume, un endroit situé au centre présumé de la Pangée, là où l’unique terre aurait commencé à se fissurer…
Mathilde Gintz explique :
« Tout est question d’immersion et de perception – comment on entre et comprend cet endroit (…)
Car c’est aussi à force d’en faire le récit, de le raconter, que l’histoire finit par devenir réelle. Ces images sont comme le lieu, toujours en mouvement, en devenir. »
Une histoire de territoires aux frontières ténues, qui apparaissent et disparaissent, à l’image d’un passé surgissant dans le présent, d’un réel dénaturé qui frise l’absurdité… Une histoire qui se conte encore jusqu’en début d’année prochaine.
Exposition de Noël
Ancien Musée de Peinture
Place de Verdun, Grenoble
Du 6 décembre 2015 au 3 janvier 2016
Du mercredi au dimanche de 14h à 19h
Visite commentée tous les dimanche à 16h
(fermeture exceptionnelle les 24, 25 décembre et 1er janvier)
Entrée libre