Trêve hivernale : ce n’est qu’un sursis

Comme chaque année, à l’approche de l’hiver, une trêve de cinq mois est accordée aux ménages expulsables. Cette année, elle a commencé le 1er novembre. Une mesure nécessaire, mais on est encore loin d’une solution.

 

Qui en bénéficie et dans quelles conditions ?

Obtenue par l’Abbé Pierre après l’hiver 1954, la trêve hivernale suspend toute expulsion de locataire quelles que soient les conditions. Attendue par des milliers de familles menacées d’expulsion, chaque année, cette mesure leur permet de bénéficier d’un répit de cinq mois jusqu’au printemps prochain, même si le propriétaire engage des procédures judiciaires à leur encontre. Cependant, cette protection ne concerne pas les locataires d’un immeuble ayant fait l’objet d’un arrêt de péril (lorsqu’un immeuble présente un danger au vu de sa solidité) et ceux dont le relogement est assuré dans des conditions suffisantes respectant l’unité et les besoins de leur famille.
La loi Alur a porté des modifications sur cette trêve en protégeant les squatteurs. Quoiqu’ils n’en bénéficient pas à 100 % car un juge peut annuler ce sursis.
La trêve concerne également les coupures d’énergie (électricité et gaz) en cas d’impayés.

Elle dure combien de temps ?

La trêve hivernale dure cinq mois : du 1er novembre au 31 mars au soir. Jusqu’en 2013, sa date de fin était fixée au 15 mars. Mais la loi Alur l’a prolongée de quinze jours. Ce qui fait qu’à partir du 1er avril, les expulsions pourront reprendre.
Quand cette trêve prend fin, tout locataire faisant objet d’expulsion doit quitter impérativement les lieux. Sinon, une procédure d’expulsion peut être engagée passé cette date. Environ 10 000 expulsions de ce genre ont lieu chaque année en France.

L’indignation des associations

Malgré les mesures prises par le gouvernement et la prolongation de quinze jours faite par la loi Alur, les associations de défense des mal-logés dénoncent l’augmentation des expulsions. Selon un communiqué de presse de la Fondation Abbé Pierre « Entre 2013 et 2014, les procédures d’expulsion locative ont poursuivi leur triste inflation : +8,8 % pour les assignations au tribunal (175 938) et +4,8 % pour les décisions de justice prononçant l’expulsion (132 016) ». Mais cela ne signifie pas que ces 132 016 familles ont quitté leurs habitations. Selon les chiffres du Ministère de l’intérieur, 11 604 ménages ont été expulsés l’année dernière avec le concours de la force publique. Un chiffre pratiquement deux fois plus élevé qu’en 2001 (6337 expulsions) et en augmentation de 15 % par rapport à 2013. Ces chiffres prouvent bien que le droit au logement opposable ( loi DALO) est bafoué. Plusieurs familles sont menacées d’expulsion ou expulsées alors qu’elles sont censées être protégées par cette loi.

Récapitulatif du Rhône-Alpes

Toutes les régions sont touchées par ce manque de protection de ces milliers des familles qui risquent de passer l’hiver dehors.
Dans notre régions, c’est alarmant ! Selon la Fondation Abbé Pierre, en 2014, sur 15 967 foyers assignés au tribunal, la justice a décidé d’en expulser 12 809. Pour les impayés de 2014, là aussi, la décision de la justice n’a pas été clémente : 12 575 foyers.
Les cris d’alarme des associations ont raison d’être. Avec ces chiffres, on voit combien se loger est un combat auquel les plus démunis font face, le plus souvent, sans succès.