Depuis quelques années, le stress au travail progresse dans notre pays et touche l’ensemble des secteurs d’activité, publics comme privés. C’est devenu une priorité nationale d’essayer de rétablir le lien entre travail et bien-être. Mais la vie se résume-t-elle au seul travail ? N’y a-t-il pas d’autres maux qui peuvent être pris en compte ?
La chanson d’Henri Salvador de 1965, » le travail c’est la santé « , reprenant le dicton de manière ironique, faisait déjà état des durs labeurs dans le monde du travail. Selon ses paroles, le repos de longue durée était vivement conseillé ! Plus de 45 ans après, force est de constater que la situation ne s’est décidément pas arrangée. En effet, les congés maladie sont devenus monnaie courante et dans certains cas se sont transformés en arrêt définitif.
L’instinct de survie de l’être humain, transposé dans le monde du travail, devrait prendre le pas. Quand ça ne va pas, il faut changer de cap. Alors pourquoi se tuer à la tâche de la sorte ? La vie professionnelle passe-t-elle avant la santé ? On peut en finir avec la vie, mais il existe une autre porte de sortie moins irrémédiable : celle de son lieu de travail. Le fait de démissionner en l’occurrence serait un mal pour un bien. Cependant, dans notre société contemporaine, on s’attache à ce que l’on a car la peur de l’inconnu, de l’avenir est fortement présente. Au final, il en ressort un sentiment de ne plus contrôler les événements, de se laisser ronger par des situations qu’elles soient personnelles et/ou professionnelles qui peuvent pousser les plus fragiles à commettre l’irréparable. Fragile : un mot en vogue dans certaines directions des ressources humaines qui fait le lien entre ces deux aspects de la vie. Si vous avez du mal à gérer les tâches qui vous incombent, qu’un autre salarié est plus efficient dans un laps de temps plus rapide, c’est soit une mauvaise gestion du temps de votre part, soit un manque de confiance évident. Là se pose la question fondamentale de la part du professionnel et de l’intime chez chacun. Prenons le cas d’un salarié d’une grande entreprise qui passe à l’acte. Comment déterminer, en son âme et conscience, la responsabilité de l’entreprise sans prendre en compte le côté extra-professionnel ? Nul ne peut répondre de manière formelle à cette interrogation. D’où une autre approche qui met au centre de l’arène et à mal l’aspect humaniste de l’entreprise. Un moyen détourné de tirer uniquement à boulets rouges sur la vie entrepreneuriale : les salariés de la chair à canon ?
Cet exemple de salarié d’une grande société, fait référence aux nombreux cas de suicide depuis 2007. Le gouvernement s’est saisi du dossier pour répondre à cette question de santé publique. De nombreuses auditions ont eu lieu auprès des syndicats, organisations patronales, responsables d’entreprise, experts, psychologues, sociologues, professeurs, pour apporter des solutions. Des rapports ont été remis, des questionnaires ont été élaborés pour l’ensemble des salariés, des mesures ont été adoptées par la suite mais le défilé des suicides ne stoppe pas pour autant. Dès lors les grandes entreprises seraient-elles incompatibles avec le maintien d’une qualité de vie ? La taille semble être un vecteur propice à des situations de mal-être.
En effet, d’après les conclusions du rapport intitulé » Bien-être et efficacité au travail » remis le 17 février 2010 au Premier Ministre François Fillon, » les difficultés dans les relations de travail , au sein d’une équipe ou avec le supérieur hiérarchique sont bien présentes notamment lorsque l’isolement réduit les occasions d’échange ou d’écoute « . En d’autres termes, plus il y a de fonctions, plus il y a de services, moins l’information se diffuse et plus la solitude est ressentie durement chez certains. Des entreprises à taille humaine, de surcroît mieux organisées réduiraient probablement ce triste bilan. À ce stade, en situation de stress, le jargon du » mobilier » rentre en ligne de compte. En effet, au bureau, on peut soit être mis au placard soit prendre la porte de gré ou de force. Le départ de l’entreprise de manière volontaire aurait comme résultat une sorte de transfert de stress. Certes, plus de symptômes récurrents mis sur le dos de la hiérarchie ou des collègues mais en contrepartie, une désocialisation naîtrait du fait d’un manque d’activité. Alors quelle solution est la meilleure ? Celle d’être mis de côté dans son emploi ou bien celle d’être mis sur le bas côté de la société ? Ce que l’on peut dire, c’est qu’un certain type de management se sert de la sinistrose ambiante pour pousser des salariés dans leurs derniers retranchements car la pression de (re)trouver un emploi est très forte à l’heure actuelle. En parallèle, les demandeurs d’emploi confrontés au stress du quotidien restent enfermés chez eux et dans leur for intérieur. Il y a donc encore des efforts à produire concernant les maux que peuvent engendrer une période d’inactivité hautement appréhendée.
Le stress, et dans son ensemble la souffrance au travail, est donc un sujet complexe qui dépend de facteurs multiples et pas seulement de l’environnement de l’entreprise. La vie est un équilibre de différentes cordes qu’il faut renforcer au fil du temps. Si une corde lâche, la solidité des autres devraient prendre le relais afin de réparer.
La vie ne tient pas qu’à un fil !
Informations
La journée mondiale pour la santé et la sécurité au travail a été instaurée par l’Organisation internationale du travail (OIT) depuis 1996 et fixée au 28 avril. Une centaine de pays participent à cette célébration avec comme soutien l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et le Bureau international du travail (BIT). Au niveau national, l’assurance maladie-risques professionnels a couvert en 2009 plus de 1 200 000 sinistres dont 800 000 avec arrêt de travail tous risques confondus.
Sur Internet, des » tests stress » très courts permettent de connaître son degré de dépendance au travail. Avant d’aller consulter, faites quelques tests. Cela permettrait dans un premier temps de mettre des » mots à vos maux « . Certains secteurs adoptent ce système pour se prémunir des éventuels risques. À l’opposé, des listes de centaines de questions élaborées pour des grandes entreprises par des cabinets spécialisés en évaluation et prévention des risques professionnels et de l’environnement ne vous en apprendront guère plus.