Dans le cadre des élections municipales de Grenoble, Le Bon Plan a sollicité chacun des neuf candidats afin de leur poser une série de mêmes questions consacrées aux problématiques sociales.
Le Bon Plan a rencontré Mireille d’Ornano, tête de liste « Grenoble bleu marine », soutenue par le Rassemblement Bleu Marine et le Front National. N’ayant pu, pour des raisons de disponibilités, nous accorder un entretien avant le premier tour, madame d’Ornano a su trouver le temps de nous rencontrer à présent qu’elle est en mesure de se maintenir pour le second, ayant réalisé 12,56 % des suffrages.
Pensez-vous que la représentativité des précaires au sein des institutions municipales est nécessaire et suffisante ? Que peut-on faire, autrement, pour donner plus de place aux précaires (titulaires du RSA, chômeurs) au sein des actions citoyennes ?
C’est aussi aux précaires de se présenter à des instances pour être représentés. N’importe quelle personne a le droit d’être représentée. Il y a des comités de quartier, ce genre de choses, et ils ont autant droit à la parole que les autres citoyens. Ce n’est pas parce qu’ils sont en précarité qu’ils sont des sous-personnes ! Ils ont leur parole, et ont certainement de bonnes idées parce qu’ils vivent des choses difficiles. Je suis moi-même présidente d’une association caritative, Fraternité Française, c’est pourquoi je suis très sensible à vos questions : il y a beaucoup de gens qui se sentent délaissés, mis sur le bord de la route !
Quelles initiatives sont à mettre en place ou à pérenniser en faveur des précaires dans la municipalité? (accès aux crèches, aide au soutien scolaire, etc.)
Je ne suis pas pour la gratuité, ce n’est pas bon pour les personnes, c’est au contraire les infantiliser. C’est important de donner sa contribution pour la personne, sinon elle a l’impression de n’être plus rien puisqu’elle n’a même pas le loisir de donner un euro symbolique. La gratuité n’est pas bonne : il faut effectivement des tarifs préférentiels pour les gens en précarité, mais je ne suis pas pour la gratuité. On demande une somme symbolique, mais il faut toujours que la personne donne quelque chose pour qu’il y ait un échange. Donner pour donner, ce n’est pas bon !
Je pense qu’on peut aussi faire un genre de « passe » sport et de « passe » culture pour les gens en précarité. Toujours sans gratuité, mais avec un tarif préférentiel. Je trouve que c’est très important la culture, et souvent la culture coûte cher. Et malheureusement, des gens n’y accèdent jamais.
Que faire pour pérenniser ou augmenter les capacités d’accueil des plus démunis ? Celui-ci doit-il uniquement passer par des associations, et comment les soutenir et s’assurer de leur bon fonctionnement ?
Il y a des foyers sur Grenoble, mais c’est important de savoir d’où viennent les SDF, parce qu’on ne peut pas recevoir tout le monde. Il faut savoir de quels SDF on parle.
La circulaire Sarkozy sur les demandeurs d’asile pose problème, parce qu’on ne peut accueillir toute la misère du monde, et ça c’est Michel Rocard qui le disait. C’est peut-être d’ailleurs la raison pour laquelle le CCAS de Grenoble est le deuxième après Paris. Il faut voir aussi quels demandeurs d’asile : vous avez les vrais demandeurs d’asile et celui qui vient pour un asile de travail, mais pas lié à la politique, où il serait en danger.
Les foyers d’hébergement, les SDF ne les aiment pas. J’ai fait une soupe populaire, j’ai vu des gens dire qu’ils ne voulaient pas aller dans ces foyers, parce qu’ils se battent, que c’est terrible. Je pense qu’il faut aller vers d’autres initiatives. Échirolles avait mis en place des petites habitations, des espèces de « containers ». Peut-être est-ce une piste.
Comment résoudre les problèmes d’accès au logement social (en particulier le temps d’attente) et celui-ci est-il la seule piste pour lutter contre le mal-logement ? Faut-il entrevoir un partenariat public-privé ?
À l’heure actuelle, je vois qu’il y a eu énormément de constructions réalisées, mais nous n’avons pas augmenté de population. Il y a des tas d’appartements qui sont vides et cela pose question : pourquoi des appartements vides et que l’on continue à en faire d’autres ? On construit, mais on ne met pas les gens dedans, et je ne sais pas pour quelle raison…
Je suis pour l’attribution des logements sociaux en séance publique, pour plus de transparence. J’estime qu’à l’heure actuelle il n’y a pas assez de transparence ! Il y a des Grenoblois qui attendent des logements depuis deux ans et qui n’ont rien. Où passent-ils, ces appartements, puisqu’il y a des logements vides ? C’est cela, mon questionnement. Il faut que ça change.
Je pense aussi que la réhabilitation de l’habitat insalubre n’est pas réalisée. On fait de la construction neuve mais on ne réhabilite pas et je trouve que c’est assez dommage, parce qu’on bétonne. C’est la « bétonnisation » à outrance !
Au-delà de la seule question du logement social, le logement sur Grenoble est trop cher, les loyers élevés empêchent les travailleurs les plus modestes à accéder à des logements décents. Que peut faire la mairie ?
Quelque chose m’interpelle : on dit que quand beaucoup d’appartements sont réalisés, cela fait baisser le coût de l’immobilier, et les loyers par voie de conséquence. Et en fait cela ne se fait pas, et les logements sont vides. En terme clair : on construit pour construire, mais en définitive ça ne sert à rien pour les Grenoblois.
Par contre, on paye des impôts exponentiels à Grenoble. Les gens qui voudraient venir habiter Grenoble reculent devant. Il faudrait baisser les impôts, baisser la fiscalité. Compenser les loyers élevés avec la baisse de la taxe d’habitation.
Si vous étiez élue, quelles seraient vos priorités en matière sociale ? Pouvez-vous établir un « top 3 » de vos priorités dans ce domaine ?
J’essayerais de créer des places en crèches. On en manque beaucoup et il faut vraiment mettre le paquet à ce niveau !
Pour les seniors, c’est important, je voudrais construire des résidences intergénérationnelles. Je pense que cela manque beaucoup à Grenoble. Il y a des tas de gens âgés qui sont dans de grands appartements, qu’ils ne peuvent plus payer. Il y a trop de logements, mais mal construits. Il fallait faire un état des lieux de ce qu’il manquait, et qui étaient les personnes demandeuses : la jeunesse et les seniors. Mais ce n’est pas comme cela que ça a été fait.
Concernant l’emploi municipal, il y a un problème certain sur la mairie de Grenoble parce qu’il y a un taux d’absentéisme qui est énorme, et je pense que c’est une défaillance de management. Quand vous avez beaucoup de salariés qui s’arrêtent, ce n’est pas un problème de feignantise : ils sont malheureux dans leur travail. Je pense qu’il n’y a pas assez de lien entre les responsables et les syndicats, qui sont tout de même les représentants du personnel ! Il n’y a pas suffisamment de discussion avec eux. Il faudrait vraiment que la mairie change son fusil d’épaule.
Il faudrait aussi, dans les quartiers comme la Villeneuve, très très populaires, mettre le paquet au niveau sécurité pour que les gens aient la paix. Qu’ils puissent vivre en toute quiétude, ce qui n’est pas le cas à l’heure actuelle parce que quand ils rentrent chez eux le soir, ils ont la peur au ventre.