Quel accès aux droits pour les personnes en attente d’un titre de séjour ? C’était la question que l’ADA et l’Odenore se posaient à l’occasion du dernier jeudi de l’Odenore en date.
Assistance
L’Odenore (Observatoire du Non-Recours) a l’habitude d’organiser ces échanges citoyens sur les questions, nombreuses, que pose la problématique du non-recours. L’habitude, mais pas toujours la possibilité : l’organisme a beaucoup de travail et la régularité des jeudis de l’Odenore, initialement censés avoir lieu tous les deux mois, n’est pas toujours simple à assurer.
Pour ce mois de janvier 2015, la question des personnes en attente d’un titre de séjour était posée, en partenariat avec Accueil Demandeur d’Asile (ADA). Une thématique suffisamment large pour attirer une assistance relativement nombreuse, en majorité composée de travailleurs sociaux. Ou plutôt : de travailleuses sociales.
Les intervenantes ont tout d’abord tenu à préciser que l’attente d’un titre de séjour ne concerne pas en soi que les demandeurs d’asile avant de poser un état des lieux qui n’a rien de réjouissant. Les droits auxquels ce public peut prétendre ne sont pas en nombre infini, quoi qu’en disent les spécialistes de l’amalgame. Hébergement d’urgence, aide médicale et protection de l’enfance sont les droits basiques de ces personnes. En revanche, et contrairement à de nombreuses idées reçues, elles n’ont pas accès au RSA.
Incohérences
Encore faut-il que ces droits, ou même l’accès à ces droits, soient respectés. Ce que les travailleurs sociaux ou les associations observent sur le terrain, ce sont des procédures de dissuasion larvées de la part de certaines administrations, qui réclameront des pièces nouvelles, qu’elles n’ont par ailleurs pas à demander, jusqu’à pousser les demandeurs au découragement.
Quant à l’obtention d’un titre de séjour, elle peut relever du parcours du combattant autant que d’un étrange jeu de hasard. Si les délais d’attente ont considérablement raccourcis, et si le rôle de medium entre le demandeur et la Préfecture assuré par La Relève a démontré son efficacité, les disparités entre les localités sont manifestes.
Un demandeur aura ainsi bien plus de chance d’obtenir un titre de séjour auprès de la préfecture de Lyon plutôt que de celle de Grenoble, ce qui ne manquera pas de laisser perplexe si l’on part du principe que, dans une République, les textes de loi sont les mêmes pour tous et n’ont pas pour vocation à être réinterprétés selon les territoires. Une réalisé qu’un responsable de l’ADA résumera d’une phrase : « la France de Courteline est devenue la France de Kafka ! »
Remontrances
Si les échanges entre la salle et les intervenants sont demeurés, avant toute chose, des partages d’expériences et des coups de gueule face aux situations ubuesques que rencontrent certaines associations d’aise aux étrangers, ce jeudi de l’Odenore aura surtout permis de mettre en avant une certaine incrédulité des acteurs sociaux qui, face à des profils complexes, doivent composer avec une application de la loi de plus en plus sévère.
Et de déplorer que les personnes les plus en difficultés soient finalement les seules à être prises en compte, produisant un effet de « surenchère à la misère » qui ne résout en aucune manière la généralité du problème, et relève d’une stratégie à court-terme qui laisse, au demeurant, s’accumuler des bidonvilles aux portes de nos cités.
Une précarisation de personnes qui découvrent une misère à laquelle ils ne sont, dans certains cas, ni habituées, ni préparées, et mène aisément à la criminalisation. « On fabrique des clandestins ! » sera l’un des cris du cœur de cet échange.