Rencontre avec Marielle Partaix, accompagnatrice à l’IFAC et psychologue du travail au service des personnes au RSA en grande difficulté dans leur recherche d’emploi. Une professionnelle inspirée et inspirante qui nous raconte son parcours, sa démarche et ses motivations.
De la psychologie à l’insertion, retour sur le parcours de Marielle Partaix
Marielle Partaix est psychologue du travail depuis 2006. Durant ses études de psychologie, elle effectue un stage au PLIE (Plan Local pour l’Insertion et l’Emploi) et un stage dans le domaine des bilans de compétences, qui confirment son envie de travailler dans le milieu de l’orientation et de l’insertion. Par la suite, au cours de ses expériences professionnelles, elle est amenée à accompagner des personnes traversant des difficultés liées à la santé, au handicap et à la santé mentale. Elle intègre finalement l’association d’éducation populaire, l’IFAC, en 2012 où sa mission consiste à accompagner des personnes en recherche d’emploi par le biais de rendez-vous individuels ou en groupe. Du fait de sa casquette de psychologue, l’association lui confie des publics aux problématiques complexes, notamment lors d’un projet avec le service d’insertion de la prison de Varces. Depuis 2017, elle accompagne des bénéficiaires du RSA dans le cadre du SIPE (Soutien Intensif préalable à l’Emploi), un projet porté par le Département de l’Isère.
Qu’est ce que l’IFAC ? l’IFAC (Institut de Formation, d’Animation, de Conseil) est une association d’envergure nationale qui se déploie en réseau au niveau régional, en partenariat avec les élus locaux. Son ancrage local, sa pédagogie, son indépendance et sa réactivité en font une association inclusive au service de la population. Ses missions sont de former des adultes aux métiers de l’animation, gérer des espaces d’animation pour enfants, accompagner les collectivités locales et associations dans le cadre des politiques d’animation et également d’aider les jeunes et adultes à la recherche d’emploi, proposer des services civiques… Implantée à Grenoble, l’IFAC est notamment partenaire de la Région Auvergne Rhône-Alpes, le Département de l’Isère et Pôle Emploi. L’association développe un volet formation autour des métiers de formateurs, des métiers de l’insertion et de l’orientation pour un public adulte. |
Le SIPE, un accompagnement sur-mesure respectueux des aspirations de chacun
Le SIPE est un accompagnement prescrit par un référent RSA d’une durée de six mois – renouvelable une fois sur demande du référent – dont les rendez-vous se tiennent tous les dix jours. Il est destiné aux bénéficiaires du RSA et aux travailleurs non salariés rencontrant des difficultés particulières dans leur recherche d’emploi, qui sortent du domaine de compétences d’un parcours classique à Pôle Emploi. L’objectif est de construire des projets professionnels pérennes, adaptés aux profils et aux aspirations des bénéficiaires, tout en prenant en compte les freins périphériques (mobilité, logement, santé, accès aux droits…).
Parfois perdues et marginalisées, les personnes orientées dans ce dispositif multiplient les années d’errance et d’éloignement du monde du travail. Pour Marielle, la réussite de cet accompagnement est liée à des échanges rassurants et authentiques : « La difficulté quand on est au RSA ou dans une situation marginale, c’est qu’on nous renvoie sans cesse à cette étiquette. Ici on prend la personne comme elle est, sans à-priori. L’accompagnement est humain et vivant. L’IFAC apporte un cadre structurant sans pour autant être un lieu strict, il ressemble à la vraie vie et je pense que ça joue un rôle dans la confiance qu’on nous accorde. »
Apporter un regard nouveau, identifier et prendre en compte ses particularités permet aux usagers d’amorcer leur propre changement : « On les amène à envisager qu’ils puissent trouver une place qui leur convient dans la société et que leur projet soit réellement possible. Une fois qu’ils ont vu des solutions, ils reprennent de l’assurance et du pouvoir d’agir sur leur parcours », complète-t-elle.
Par ailleurs, quand le bénéficiaire rencontre un problème qui sort de son domaine d’expertise, Marielle n’hésite pas à solliciter les partenaires et acteurs concernés : « Pour un dossier logement, par exemple, on fera appel à une assistante sociale. On a ce côté touche-à-tout, mais à la fois, on mobilise les spécialistes dès qu’on peut le faire. »
A l’issue du parcours SIPE, les personnes accompagnées partent en emploi, en formation, retournent à un suivi plus classique avec Pôle Emploi ou en PER (parcours emploi renforcé) selon leur niveau d’autonomie. Certaines situations pouvant être délicates et les cheminements laborieux, Marielle et sa collègue maintiennent un travail de veille après la période de SIPE durant lequel elles s’assurent que la personne continue son parcours vers l’emploi.
« Au cours de ces rendez-vous réguliers, un lien se crée. Quand l’accompagnement s’arrête, certains s’effondrent et repartent dans leurs schémas antérieurs à la prise en charge. C’est pourquoi on ne laisse pas la personne démunie, on lui permet de rester en contact en cas de besoin », explique Marielle.
Aider les autres : une vocation
Passionnée par son métier, Marielle exprime un dévouement et une volonté sincère à trouver des solutions grâce à son expertise : « ma mission ne se résume pas à créer des CV, je cherche à creuser pour trouver des solutions. J’aime mettre à profit mes compétences de psychologue du travail. Cette approche étant issue de la psychologie sociale, il s’agit d’aider la personne en tenant compte de son environnement, dans sa globalité. »
Son optimisme naturel lui permet d’identifier et de mettre en lumière les capacités et les qualités de chaque individu afin d’inspirer un changement d’attitude :
« je crois en la vie, en l’être humain et je pense que c’est quelque chose que je sais transmettre. Je vois souvent arriver à l’IFAC des gens qui ne croient plus en rien et qui terminent l’accompagnement avec une étincelle, qui reprennent confiance en eux, c’est cela qui m’anime ! »
Vers une coordination plus efficace entre les structures
Marielle a parfois rencontré des situations délicates par manque de communication entre les différentes structures accompagnant les personnes en difficulté. A titre d’exemple, elle relate la situation d’un monsieur accompagné par l’IFAC qui souffrait de troubles psychotiques et ne parlait pas bien la langue française. Ce dernier s’est un jour retrouvé en danger d’expulsion du foyer où il vivait, sans que les structures accompagnantes ne se soient coordonnées, n’ayant pas conscience d’être plusieurs à suivre cette personne. Par ailleurs, le foyer où vivait cet homme n’était pas informé de sa pathologie car celui-ci ne disposait pas encore de l’AAH (Allocation Adulte Handicapé). Finalement, en se mettant en lien avec le CMP (Centre Médico-Psychologique), Marielle parvient à faire revoir son expulsion et à monter un dossier d’AAH.
« Je me dis que si tous ces acteurs travaillaient en lien, il n’y aurait pas autant de péripéties et les démarches seraient plus rapides. Avec ce type de public, on doit prendre en compte chaque facette de sa vie. Je souhaiterais développer cette coordination, prendre du temps pour cela » conclut Marielle Partaix.
Des projets engagés pour la santé mentale
Afin de mieux répondre à certaines problématiques rencontrées sur le terrain et d’approfondir ses compétences, Marielle Partaix vient de valider un Diplôme Universitaire (DU) en Santé Mentale. « Dans les prochaines années, j’aimerais mettre en place des spécificités autour de la santé mentale dans notre accompagnement. Car souvent, avec les personnes ayant ce type de problématiques, six mois c’est très court et on a besoin de travailler plus longtemps » détaille Marielle. Animée par le souhait d’améliorer durablement les conditions de vie des personnes en difficulté, elle nous révèle avec enthousiasme ses ébauches de projets :
« J’aimerais aussi pouvoir travailler avec des entreprises afin de déstigmatiser la santé mentale dans le milieu professionnel et de mettre en avant tous les dispositifs qui existent dans ce domaine. Les personnes souffrant de maladies mentales sont majoritairement « définies » par leur trouble or, la maladie ne définit pas une personne. Monsieur untel n’est pas bipolaire, il souffre de bipolarité, c’est différent, le vocabulaire est important. Si elles sont stabilisées cliniquement, ces personnes peuvent travailler, elles ont des compétences, des capacités… Il ne faut pas oublier que le rétablissement passe aussi par l’emploi. »