Le covoiturage est jugé suffisament important aujourd’hui, pour que la direction des transports du Conseil général ait créé, dans le cadre du service des nouvelles mobilités, un projet de covoiturage dynamique, « Ecovoiturage ». Le Bon Plan a rencontré Yvan Martinod, chef du projet au Conseil général.
D’où vient l’idée de mettre en place un dispositif de covoiturage sur la région ?
« Autour de Grenoble on a des soucis de saturation du trafic. Au Conseil général, le budget de transport a doublé entre 2000 et 2005. Il y a donc eu une évolution importante du réseau trans-isère, avec la création de nouvelles lignes, une amélioration du parc de cars. Du coup le Conseil général a décidé de travailler sur des nouvelles formes de mobilité. Ça répond à un objectif de service public, qui est de fournir aux usagers toujours plus d’offres de mobilité. Mais le véritable objectif c’est la solution à tous les problèmes de saturation du trafic. Les entreprises grenobloises font pression aujourd’hui. Elle en ont marre de la congestion, qui est un problème dans l’acheminement des matières premières, de leurs salariés et de leurs fournisseurs. Donc il fallait absolument travailler sur la réduction du trafic automobile, surtout quand on sait que pour éliminer complètement un bouchon il faut enlever seulement 15% des véhicules. »
Etes vous parvenu à cet objectif ?
« On se heurte à beaucoup de freins. Il y a un poids très lourd de l’usage individuel de la voiture, qui est encore sacré. Il y en a aussi qui ne sont pas intéressés, parce qu’ils ne veulent pas prendre n’importe quel passager. Il y a la peur du chauffard, la crainte d’un covoitureur désagréable. Ça c’est le frein classique, que l’on connaît bien, et que l’on tente de lever par différentes incitations, comme des animations en entreprise, ou des incitations financières comme la création d’une prime pour les covoitureurs, de 20 ou 30 euros par mois. On travaille aussi sur la mise en place de plans de déplacements inter-entreprises.
Quelle dynamique de succès avez vous enregistrée ?
« Il y a une dynamique de succès qui est portée par toutes les institutions aujourd’hui. La région Rhône-Alpes par exemple, a pris position en mars 2013 sur l’écomobilité. Elle devrait reprendre la main sur toutes les plate-formes de covoiturage, sur tous les départements de la région pour les fédérer en une grande plate-forme, qui aurait le grand avantage d’avoir une seule base de donnée, et donc de multiplier les offres et les demandes de mise en relation, tout en conservant les antennes départementales. On travaille donc sur l’inter-opérabilité entre services. Avant les opérateurs ne se parlaient pas. Maintenant, sur demande des collectivités, les maîtres d’ouvrages, on exige des différents prestataires qu’ils se mettent en inter-opérabilité. Moi je travaille à ce que soit élargi autant que possible le périmètre, faire en sorte que l’on ait des institutions régionales ou nationales qui prennent la main et qui concourent à l’unification, dans une optique de simplification et de rationalisation des dépenses, parce qu‘aujourd’hui une multitude de bases de données coûtent cher. Et tous les départements seraient d’accord pour y concourir, dans un objectif d’efficacité. Donc l’outil est indispensable, mais il faut l’agrémenter d’une politique de covoiturage plus large. ».
Quels sont les projets d’Ecovoiturage pour l’avenir ?
« Notre projet c’est de fiabiliser la plate-forme. Elle sera prochainement retoilettée pour devenir plus érgonomique et plus intuitive. Et on va retravailler le parcours client, faire en sorte qu’il soit le plus simple possible. Après, l’ambition de la direction générale, c’est de rassembler toutes les autorités organisatrices des transports de l’Isère sous une même bannière et de transmettre le dispositif à la région. Le projet, un peu complémentaire, c’est aussi d’arriver à harmoniser les outils d’animation et de communication sur l’ensemble de l’Isère. Après, nous allons nous occuper de l’aménagement du parc-relais, des incitations, du travail de communication et d’animation auprès des collectivités et des entreprises. Et l’idée finale c’est que tout le monde puisse faire de l’écovoiturage tout le temps. Je suis au bord de la route, je fais une demande, et aussitôt une voiture passe devant, me prend et me dépose. C’est l’objectif auquel on concourt. »
Vous est-il arrivé d’essuyer des déconvenues (mésaventure avec des passagers par exemple) ?
« Globalement, et presque toujours, le covoiturage est vertueux. Quand on est covoitureur, on conduit mieux, on met la musique moins fort, on s’efforce d’être sympathique. Quand on a en charge la responsabilité de quelqu’un, on ne veut pas donner une mauvaise image de soi. Et c’est pour ça que le covoiturage est vertueux. Les mauvaises expériences sont rarissimes. Les gens qui font du covoiturage aujourd’hui ne sont pas des gens mal intentionnés. On fait du covoiturage parce que l’on y croit, on joue le jeu. »
Dans quelle mesure Ecovoiturage s’inscrit il dans la politique de transport du Conseil général ?
« On va parler, plutot que de politique de transport, d’offre de mobilité. Aujourd’hui on a une offre lourde de mobilité qui est le réseau TransIsère. Plus on est en agglomération, plus c’est facile de faire du transport pertinent, puisque, quelque soit l’endroit, on desservira toujours des zones habitées. Mais plus on s’écarte, plus on est obligé de partir en étoile, et plus il est dur d’être pertinent sur la desserte entre les rayons de l’étoile. On est donc obligé de délaisser des endroits. Au début des années 2000, l’objectif du Conseil général était de desservir toutes les communes sur toute l’isère, ce qui fait 480 communes. Mais aujourd’hui, on pense que l’on ne peut pas matériellement et financièrement atteindre cet objectif, et on se tourne vers des offres de mobilité comme le covoiturage. Le Conseil général veut jouer à fond l’offre de mobilité, faire en sorte que tout le monde, quelque soit l’endroit où il habite puisse se déplacer. »