Le Plan quinquennal contre la pauvreté a été officiellement adopté, le 21 janvier 2013, lors du Comité Interministériel de Lutte contre les Exclusions (CILE) qui ne s’était plus réuni depuis 2006.
Rappelons qu’il est l’aboutissement d’un important travail préparatoire mené à l’automne dernier sous forme d’ateliers thématiques, dont les conclusions ont été présentées lors de la conférence nationale contre la pauvreté et pour l’inclusion qui s’est tenue à Paris les 10 et 11 décembre dernier.
Le CILE devrait désormais se réunir une fois par an, sous la présidence du Premier ministre, pour faire le point de l’avancée des mesures du plan et décider d’éventuelles réorientations.
En préambule, le rapport, d’une cinquantaine de pages, rappelle le contexte actuel particulièrement alarmant et l’urgence à intervenir, à savoir – pour ceux qui l’ignoreraient encore ! – que la pauvreté n’a cessé de s’intensifier depuis 2002, que la part des personnes en situation de pauvreté a atteint en 2010 le taux record de 14,1 %, que la pauvreté monétaire a pour conséquences directes le mal-logement, le renoncement aux soins ou encore l’exclusion bancaire. Il rappelle aussi que la précarisation massive du marché du travail ne protège plus les travailleurs contre la pauvreté.
Deux principes réaffirmés : « non-stigmatisation » et « juste droit »
Deux des principes réaffirmés dans ce rapport expriment plus particulièrement la volonté du Gouvernement de se démarquer des discours martelés durant le précédent mandat sur l’assistanat et la fraude sociale : le principe de « non-stigmatisation » des personnes en situation de pauvreté et celui de « juste droit », qui renvoie à l’urgence de s’attaquer au phénomène du non-recours et de l’accès effectif aux droits.
Concernant les principales mesures adoptées, le rapport reprend pour l’essentiel ce que Jean-Marc Ayrault avait annoncé en décembre dernier sans apporter plus de précisions sur les moyens qui permettront de les financer. Le Premier ministre a assuré qu’il n’y aurait ni impôt supplémentaire, ni nouveau prélèvement mais des « redéploiements budgétaires« . Retour sur quelques-unes d’entre elles.
Revalorisation du RSA socle et réforme du RSA activité
Le rattrapage de 10 % en cinq ans du niveau du RSA socle, qui, rappelons-le, équivaut actuellement à 43% du SMIC (à l’origine, le montant du RMI avait été fixé à 50% du SMIC), ne débutera qu’en septembre 2013 avec une première revalorisation de 2%. Son coût a été évalué à au moins 1 milliard d’euros à l’horizon 2017, à effectifs constants d’allocataires.
A noter que le Gouvernement souhaite « étudier les moyens de tenir compte de la situation particulière des femmes victimes de violences dans le calcul des droits au RSA »
Le devenir de l’Aide Personnalisée au Retour à l’Emploi (APRE) à destination des allocataires du RSA en reprise d’activité, sera statué dans le courant du premier semestre 2013, à l’issue d’une concertation avec les départements. En effet, la gestion de cette aide est jugée « trop complexe et inégale selon les territoires ».
Concernant la réforme du RSA activité, qui pâtit d’un taux de non-recours important (68 %), en articulation avec celle de la Prime Pour l’Emploi (PPE), sa mise en œuvre n’est pas prévue avant début 2014. Le groupe de travail chargé de la réforme de ces deux dispositifs, théoriquement opérationnel dès février 2013, « devra proposer des mesures concrètes et chiffrées avant la fin du premier semestre 2013 ». Il associera à sa réflexion « des personnes en situation de pauvreté et les représentants des différents acteurs des politiques de solidarité ».
Instauration d’une garantie jeunes
Le Gouvernement prévoit une « garantie jeunes » pour les 18-25 ans sans emploi ni formation en cours, en situation d’isolement et de grande précarité. Ce contrat annuel, passé entre le jeune et le service public de l’emploi, comportera un certain nombre d’engagements réciproques. Pour le service public de l’emploi, la mise en place d’un accompagnement intensif, des propositions adaptées de formation ou d’emploi et une allocation d’un montant équivalent au RSA-socle pendant les périodes où le jeune sera inoccupé. Pour le jeune, un engagement à l’assiduité et à l’acceptation des offres de formation ou d’emploi adaptées qui lui seront proposées.
La « garantie jeunes » démarrera en septembre 2013, dans 10 territoires pilotes, avant d’être progressivement généralisée.
Maintien d’un volume stable de contrats aidés et allongement en durée
Dès le premier semestre 2013, l’allongement de la durée moyenne pour tous les nouveaux contrats signés sera engagé, en vue de s’approcher d’une durée moyenne de 12 mois. Le volume horaire devra proposer une grande souplesse, allant de quelques heures par semaine jusqu’à 35, selon les situations et les besoins des personnes. Enfin, un volume stable de contrats aidés sera garanti pour les personnes les plus éloignées de l’emploi.
Elargissement du champ des bénéficiaires de la CMU-C et de l’ACS
La hausse annoncée du plafond de la CMU complémentaire ne se fera pas avant septembre 2013. Elle devra faire entrer 750 000 personnes de plus dans ce dispositif. Elle s’accompagnera mécaniquement de l’élargissement du champ des bénéficiaires de l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé (ACS), dont le plafond de ressources correspond à 35% de celui de la CMU-C.
A noter qu’une campagne d’information sur l’accès à l’ACS, qui connaît un taux de non-recours record (près de 78%), est prévue dans l’année 2013 et se doublera d’informations sur les tarifs sociaux de l’énergie.
Soutien aux familles en difficulté
La pauvreté touche durement les familles monoparentales (taux de pauvreté de 32,2%) mais aussi, dans une moindre mesure, les familles nombreuses (taux de pauvreté des couples avec au moins trois enfants de l’ordre de 22,7%). Le gouvernement s’engage à augmenter le niveau des prestations familiales au profit de ces familles, avec notamment l’augmentation du montant de l’allocation de soutien familial (ASF) et une majoration du complément familial (CF).
L’accès aux crèches des enfants de ces familles doit enfin être assuré à hauteur de 10 % des effectifs au minimum.