Le rapport social de 2011 dans lequel la Société Générale chiffre le pourcentage de stagiaires dans sa masse salariale à 25% a fait beaucoup de bruit. Cette proportion est-elle excessive ? Pourquoi suscite-elle autant de débat ? Explications.
Parmi les 42 101 salariés de la banque, 11 241 ont été stagiaires. Pour comparer, la BNP Paribas en a embauché presque cinq fois moins pour à peu près le même effectif (2 766 sur 47 100).
De plus, la Société Générale a supprimé 880 postes en 2012. Un autre amincissement de la masse salariale d’un autre millier d’employés est prévu d’ici à la fin 2014, accompagné par la fermeture de « quelques » agences. Dans ce contexte d’austérité budgétaire, l’augmentation du bonus du patron, Frédéric Oudéa, va clairement à contresens de la dynamique générale.
L’entreprise se défend que la catégorie « stage » en comprenne plusieurs types : les stages courts de découverte des lycéens, et les contrats « d’auxiliaires de vacances », c’est-à-dire les contrat de remplacement en période de congés. En outre, la banque annonce un projet de recrutement de 1 500 postes en CDI pour l’année 2013, principalement destinés aux jeunes.
Stage ou premier emploi ?
A l’origine, le principe de stage(s) intégré(s) dans le parcours universitaire permet à l’étudiant de mettre, au moins partiellement, les connaissances théoriques en pratique, d’intégrer les savoir-vivre du monde du travail et idéalement d’ouvrir une porte à l’emploi. Progressivement, l’expérience du stage s’est imposée et est devenue un élément indispensable sur le cv de jeune diplômé afin de décrocher un premier emploi. De même, employer des stagiaires participe dorénavant à la création d’une bonne image d’une société « socialement responsable ».
Si le sujet fâche, c’est parce que la notion de stage est en train de se vider de sa raison d’être principale. D’abord pour recruter un stagiaire, les employeurs préfèrent de plus en plus les profils expérimentés. Ensuite, les étudiants sont moins qu’avant embauchés sur des contrats pérennes à la fin de leur stage, les entreprises préférant prendre un autre stagiaire à la place. Enfin, les stagiaires sont souvent recrutés pour exercer des missions classiques sur un poste complet, ceci pour une fraction du salaire d’un employé standard.
Statut et protection des stagiaires
Afin de motiver les entreprises à embaucher des stagiaires, plusieurs avantages ont été mis en place. Les stagiaires ne comptent pas dans la masse salariale, par conséquence, l’employeur ne paie presque pas de charges sociales et à la fin du contrat stage il n’y a pas d’indemnité de précarité (10% de rémunération totale comme c’est le cas pour le CDD). Si le stage dure plus de 2 mois consécutifs, il doit être payé, l’indemnité minimum est fixé à 436 euros en 2013. La durée de stage ne peut excéder 6 mois dans une année scolaire et la période de présence dans l’entreprise ne peut continuer au-delà de l’année scolaire du stagiaire. Du moins en théorie.
Le droit du travail pense aux stagiaires avant tout de façon individuelle. Malgré tout quelques arrêts de tribunaux et décisions de l’inspection du travail ont mis dernièrement à l’évidence que les abus du statut « stagiaire » sont considérés comme fait : on ne peut pas utiliser des stagiaires en lieu et place de salariés et il est interdit de pallier l’accroissement temporaire d’activité par l’augmentation du nombre de stagiaires de même qu’il est interdit d’avoir plus de stagiaires que de salariés.
Individuellement, les stagiaires ne peuvent pas être embauchés pour remplacer un salarié absent ou pour occuper un poste complet. Le stagiaire ne peut pas être soumis à l’obligation de résultat non plus. Ces derniers éléments clairement prévus pour protéger l’étudiant sont, toutefois, souvent remis en cause par les stagiaires eux-mêmes qui souhaitent valoriser l’expérience du stage en exigeant des dossiers complets et complexes, en essayant de prouver qu’ils en sont capables.